Au delà du père, le père de l’au-delà

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D – Père et Prophètes

Le premier constat au sujet des prophètes, c'est que d'une manière ou d'une autre, ils s'opposent aux lois sociales. Il sont contre les lois ou les symboles des lois ou les lois symboliques. A ce propos, on peut étudier les trois prophètes monothéistes, MOISE, JESUS et MOHAMMAD.

MOÏSE et son Père

L'étude de S. FREUD sur MOISE s'insérait dans une autre projet, mais il cite une fois la relation de celui-ci avec son père : "Le père de MOISE avait certainement donné à son fils un nom composé …"(3) L'histoire nous raconte que : "Le Pharaon désire amoindrir leur (les hébreux" importance démographique... Il ordonne ainsi de tuer tous les fils nouveaux - nés. YOKEBED, tante et femme de AMRAH, tous deux de la tribu de LEVI, met au monde un garçon, MOISE. Elle le cache pour qu'il ne soit pas tué. Il sera recueilli par la fille de Pharaon, nommée BITYA.
Après avoir tué un égyptien maltraitant un hébreux, il se sauve au pays de Madian où il épouse la fille de JETHRA, grand prêtre du lieu, et reçoit sa mission sur le mont Horeh. Du milieu d'un buisson ardent, Dieu lui parle : "c'est moi le Dieu de tonnerre, le Dieu d'ABRAHAM, le Dieu d'ISAAC et le Dieu de JACOB"(10).
Après cet événement, … La peur du peuple est telle qu'il demande à MOISE que Dieu ne lui parle plus directement. D'après S. FREUD? L'Image de Dieu pour MOISE est "unique, tout puissant, inaccessible. Le regarder n'est pas supportable, on n'a pas le droit de faire une image de lui, on n'a même pas le droit de prononcer son nom". Cela veut dire et je cite encore S. FREUD : "l'interdiction de se faire une image de Dieu, donc l'obligation d'adorer un Dieu qu'on ne peut pas voir … Mais si on admettait cette interdiction, elle devait nécessairement exercer une action en profondeur. Elle signifiait en effet une mise en retraite de la perception sensorielle au profit d'une représentation qu'il convient de nommer abstraite, un triomphe de la voix de l'esprit sur la vie sensorielle, à strictement parler, un renoncement aux pulsions … chez les enfants et les adultes névrosés, ainsi que chez les peuples primitifs, c'est ce phénomène psychique que nous appelons la croyance en la toute puissance de la pensée"(3).

JÉSUS et son Père

Il conviendrait de mieux distinguer le JÉSUS de l'histoire et le Christ de la foi. Nous nous intéressons aux deux cas le premier existe dans le contexte et le deuxième est ce que l'on dit autour de lui. Son père JOSEPH, qui descendait de DAVID, était charpentier et lui apprit son métier. Sa mère s'appelait MARIE. Le thème central de la prédication de JESUS est la venue imminente du règne de Dieu. JÉSUS parlait directement au nom de Dieu, il appelait constamment son Père, il vivait avec lui dans une intimité filiale intense qui ne correspondait pas à l'atmosphère religieuse entretenue par le judaïsme. C'est au nom de cette relation privilégiée qu'il se présentait comme l'envoyé et même le Fils unique mandaté directement par Dieu …
Mais la fidélité à la mission dont il avait conscience d'être investi par Dieu entraînait inexorablement JÉSUS à affronter les plus hautes autorités religieuses. Dans sa pensée, S. FREUD lie le sacrifice du Christ à sa propre théorie du père mort : "le Christ sacrifié sa propre vie et, par cet acte, délivre la troupe des frères du péché originel de l'homme est … un péché contre Dieu le père, ce péché était un meurtre"(5).

MOHAMMAD et son Père

Le Coran est considéré comme le recueil des paroles de Dieu dictées à MOHAMMAD. Fils d'un homme nommé ABDALLAH et d'une femme appelée ANINA, MOHAMMAD perdit son père avant sa naissance et sa mère trois ans après. Le nom de son père ABDALLAH signifie "esclave d'ALLAH" comme dans ABDELMOTALEB (le père d'ABDALLAH), MOTALEB est le nom d'une autre idole. Le père d'ABDALLAH était responsable de la maison de KAABA, lieu où étaient conservées les grandes idoles. Les Arabes croyaient originellement en un dieu, mais à l'époque où le Prophète MOHAMMAD naquit, leur religion avait tourné en polythéisme, culte des étoiles et fétichisme. Ils adoraient de nombreuses divinités. Chaque secte ou tribu avait son propre Dieu particulier. Les idoles se trouvaient dans chaque maison et on leur rendait hommage pour s'assurer leur contentement et prévenir leur colère.
Néanmoins, ils avaient une vague idée d'un Etre Suprême, appelé ALLAH, qui se trouvait au-dessus de toutes ces divinités. C'est par ALLAH qu'ils juraient et c'est son nom (BISMUKA ALLAHUMMA) qu'ils scellaient leurs conventions et traités, étant donné que les dieux inférieurs appartenaient à une partie et non à l'autre, et qu'il ne convenait dont pas de les invoquer dans de tels cas. De là, la nécessité d'un Dieu universel.
WELHAUSEN dit "l'adoration d'ALLAH venait en dernier lieu. Les dieux préférés furent ceux qui représentaient les intérêts d'un cercle particulier et qui satisfaisaient les désirs de leur adorateurs"(20). Ils adoraient aussi les anges, qu'ils appelaient déesses, c'est à dire, les femmes ou les filles de Dieu. Ils représentaient leurs images de granit gris, principale idole de la tribu de THAQIF à TA'IF, et AL 'UZA, un bloc de granit long de quelques six mètres, furent adorés comme les femmes du Dieu suprême. HOBAL, une immense idole de forme humaine, apportée de Syrie et installée avec ostentation dans un haut lieu d'honneur, fut adorée à la KAABA où furent consacrées un grand nombre d'idoles et les images D'IBRAHIM et D'ISMAIL portant chacun dans ses mains des flèches divinatoires. Tel était l'état de la religion des Arabes avant MOHAMMAD.

MOHAMMAD était un homme doté d'une certaine force de pensée et de charismes spécifiques. Si l'on en croit son surnom MOHAMMAD "AMIN", c'était un homme très honnête, très fidèle. Dans ses premières révélations, ALLAH était le plus grand, ce qui laisse penser "plus grand que les autres idoles". Celles-ci doivent donc s'effacer devant lui : il n'y a donc pas d'autre Dieu qu'ALLAH.
Si MOHAMMAD fut un homme supérieurement intelligent, mesuré, équilibré et réaliste, il n'en était pas moins doté d'un tempérament nerveux, passionné, fiévreux, plein d'inspiration ardentes … Il prit l'habitude de faire des retraites dans l'une des cavernes d'une montagne proche. Un jour, vers l'an 610, il eut une vision comme le "surgissement de l'aube" : il entendit une voix et vit, selon la tradition, l'archange GABRIEL qui lui transmit les paroles de Dieu … Dans le Coran, ALLAH est le créateur unique et tout puissant, qui demandera des comptes au jour terrible du jugement dernier. Il est le père absolu au pouvoir pur Il est le savoir même, la connaissance pure. Il est partout et il est le temps même. Il était, il est et il sera.
ALLAH et la lumière dans les cieux et sur la terre. Dans le Coran, ALLAH est plus proche de chacun de nous que nous-mêmes. On constate que les caractéristiques attribuées à ALLAH sont toutes absolues. Dans la tradition islamique on ne peut pas écrire ALLAH sur un papier de peur de le faire écraser. Il n'a pas d'image, pas de statues. Il est sans manifestation réelle, ni semblable ni métaphorique. Seuls les rituels sont permis comme actes symbolique purs. Dans les mosquées, une sont autorisées que la calligraphie et les signes géométriques.
Dans certains récits mystiques, on peut imaginer ALLAH comme un être humain, mais dans le Coran, cette approche est impossible. Pour MOHAMMAD, le Coran et les révélations sont son miracle à lui. Autrement dit, son discours est fait de mots qui ne peuvent pas avoir de semblables. Il a été persuadé sans qu'aucune trace n'en reste dans le réel. Comme lui est venue cette révélation ? D'après les écrits : "A certains moments, elle n'arrive pareille au tintement d'une clochette et c'est pour moi le plus pénible. Puis la révélation s'interrompt et alors seulement je sais ce que l'ange m'a transmis. D'autre fois, l'ange se montre à moi sous une forme humaine, il ne parle pas et je retiens ce qu'il m'a dit ". Pour l'lslam, le désir est le désir d'ALLAH. Rien ne se fait sans sa décision : "ALLAH est près de tes veines". Tout commence par le nom d'ALLAH, même pour les actes intimes.
De toutes ces observations on peut déduire que pour MOHAMMAD, ALLAH est l'ensemble des signifiants purs, des symboles non noués avec l'imagination. Chaque signifiant est donc déconnecté des autres signifiants absolus. Pour lui, c'est ALLAH qui unit le désir des êtres humains à la loi. Comme le dit J. LACAN : "La vraie fonction du père est d'unir un désir à la loi"(8). ALLAH est un père sublime comme pour S. FREUD : "le Dieu juste et la bienveillante nature" ne sont que les plus nobles sublimations de notre complexe parental"(11).
Pour MOHAMMAD, ALLAH fonctionne comme un grand Autre, comme "trésor de signifiants" plutôt que comme signifiants maîtres et absolus, comme pouvoir absolu, savoir absolu, le temps même et le lieu même. On constate que le lien imaginaire ne noue pas le réel à la symbolique. Comme le dit J. LACAN "l'homme a pu entrer dans l'ordre symbolique comme sujet, par la voie d'une béance spécifique de sa relation imaginaire à son semblable"(8). Alors sans imaginaire, il n'y a pas de semblable. Il est unique, il est prophète et la voix est réelle. Il est l'unique interlocuteur
Ce n'est pas étonnant que MOHAMMAD adore ce que son père ABDULHAH adorait et s'identifie comme unique interlocuteur d'ALLAH (nom du père). Cette adoration pour lui va jusqu'à se proclamer la femme d'ALLAH : "Pour vous je suis la mère et ALLAH est le père".

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